Un quart d’heure en Irlande ça dure 80 minutes

Le plus dur contre les irlandais c’est le premier quart d’heure, surtout parce qu’il dure 80 minutes. L’irlandais ne se bat pas parce qu’il veut gagner, quand il est mené au score, ou parce qu’il est blessé dans son orgueil. Il se bat parce qu’il est irlandais, donc il se bat tout le temps.

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L’Irlande ce n’est pas l’Italie et Dulin en fait les frais dès les premières minutes. Contré sur son premier dégagement et dépossédé du ballon sur sa première réception de chandelle. La zone de notre arrière est d’ailleurs particulièrement ciblée en ce début de match. Les irlandais veulent nous pendre, leurs chandelles systématiques sont hautes et courtes afin de pouvoir disputer le ballon à chaque point de chute. Le premier rideau n’est à aucun moment franchi autrement que par le jeu au pied. Les irlandais ont la main mise sur le ballon et Willy Burns ouvre logiquement le score à la 19° suite à une faute d’Ollivon pénalisé dans le camp irlandais après un plaquage.

Ça se complique vraiment pour le XV de France à la 23° suite à un croc en jambe de Bernard Leroux. Pour les esthètes, le geste est très discret car le flanker ne modifie en aucun moment sa course, mais à la vidéo cela se voit tout de même et l’arbitre sort le carton jaune. En supériorité numérique les irlandais accélèrent immédiatement le jeu et attaquent l’aile droite du XV de France. Le surpuissant ailier Lowe est inarrêtable malgré le plaquage de Dulin et va en dame. Heureusement pour nous, son essai dévastateur est annulé à cause de son pied droit en touche, seulement visible après de multiples visionnages de vidéo. Il s’en est vraiment fallu d’un cheveu !!! Sur la touche qui s’en suit, bien entendu contrariée par les irlandais, on bénéficie d’une mêlée salvatrice, avec un Gaël Fickou en Leroux de secours de la mêlée française. On prend la pression, on talonne à la main mais curieusement l’arbitre, assez moyen aujourd’hui, ne voit pas la faute et on reprend la mêlée. Ouf !!!

Le XV de France dos au mur est après tout seulement mené 3 à 0, et fait dos rond malgré la pression. Au jeu au pied tactique irlandais les bleus répondent par du jeu au pied, et on peut se demander si c’est la bonne tactique, dans la mesure où on est nettement dominé en touche. Si les irlandais ne semblent pas avoir l’intention (ou les moyens) de franchir notre premier rideau défensif, on aurait peut-être intérêt à mieux conserver le ballon et à le faire circuler entre les mains de nos trois quarts.

Il suffisait de le dire : à la 28° minute les bleus enchaînent les temps de jeu avec la volonté de se faire des passes dans le dos du plaqueur. A ce jeu-là, Fickou, Dupont et Penaud s’illustrent, s’engouffrent dans la défense irlandaise qui est obligée de se regrouper et dégarnit le côté gauche où Charles Ollivon marque en position d’ailier le premier essai français !!! 7 à 3 à la 30°après la transformation facile de Jalibert.

La statistique qui en dit long sur la domination et la pression irlandaise en cette fin de mi-temps: les français ont été obligés de faire plus du double de plaquages que les irlandais en première mi-temps (environ 90 contre 40). La pression des verts est omniprésente, mais on se rend compte que plus on joue à la main, plus les irlandais sont mis en difficulté : à la 38° le pilier gauche irlandais Healy plaque et se trouve bloqué en position de hors-jeu : 10 à 3 pour les bleus, ce sera le score à la mi-temps.

On sent beaucoup de sang-froid et de maturité dans l’équipe France, qui malgré des statistiques très défavorables en première mi-temps mène au score. En ayant été dominée territorialement, dans la possession du ballon, humiliée en touche (incontestablement le point noir du jour), et joué en infériorité numérique pendant 10 mn, les bleus ont sous les déferlantes celtes posé dans le premier acte les fondations de la victoire.

Dès le coup d’envoi de la deuxième mi-temps les irlandais sont pris à la gorge. Les bleus trouvent une belle touche et Marchand transperce férocement  la défense jusqu’aux 5 mètres. Dupont veut ouvrir au loin mais le ballon heurte accidentellement la tête de Willemse qui semblait pourtant bien placé pour marquer, à deux mètres de l’en-but. Il suffisait peut-être de le servir ?

Dans la foulée, le pilier gauche et le seconde ligne irlandais se télescopent violemment en plaquant Aldritt à deux. Le choc entre les têtes est violent et l’arbitre interrompt immédiatement le jeu : rien ne va plus pour les verts.

L’Irlande semble montrer ses limites et on a l’impression qu’elle ne pourra offrir plus que ce qu’elle a proposé en première mi-temps, contrairement à l’équipe de France qui semble avoir un potentiel offensif collectif supérieur et la capacité à faire le break à tout moment.

55° belle attaque incisive française. Jalibert voyant un surnombre défensif irlandais sur le côté gauche où il allait ouvrir, se ravise et renverse côté droit ou il alerte ses trois quarts. Ou plutôt son trois-quart. En effet, Dulin est seul mais il a de l’espace, il manœuvre son unique défenseur pour temporiser et servir Damian Penaud qui se propose rapidement à l’extérieur et marque en coin. Jalibert enroule trop son coup de pied et manque de peu la transformation : 15 à 3 pour le XV de France auquel la victoire ne semble plus devoir lui échapper.

Mais à la 56° Ollivon est pénalisé à la réception d’un ballon, coupable d’avoir pris dans les airs le trois-quart irlandais qui réceptionnait un coup de pied. Sur la pénaltouche pourtant déviée dans le camp français, le rebond du ballon qui tombe sur la pointe prend complètement à contre-pied Dupont et le remplaçant Kelleher, très heureux, file dans le couloir de touche jusqu’en terre promise pour un essai coup de poignard transformé qui plus est par Ross Byrne : 15 à 10 l’espoir renaît côté irlandais.

Dès lors et le match ne cessera de monter en intensité. Les impacts se multiplient et le ballon est âprement disputé. Les irlandais sont nettement plus mobiles et ambitieux mais les français répondent présent dans le combat. A la 63°un plaquage haut de Willemse nous coûte une pénalité qui ramène les irlandais à 15 à 13, ça devient chaud les marrons !!!

70° le ballon heurte le poteau gauche sur une tentative de pénalité à 47m en coin de Jalibert consécutive à une faute en touche sur Charles Ollivon qui semble blessé au genou.

Les français parviennent à contenir les irlandais dans leur camp, et multiplient les cocottes pour garder le ballon au chaud pendant que le chronomètre met la pression sur l’Irlande. Une pénaltouche à la 79° suite à une poussée dans le dos de la part de Crétin semble être la dernière opportunité de remporter le match côté irlandais, ça sent la pénalité de dernière minute !!!

Mais le XV de France parvient à défendre les dernières velléités offensives des verts sans se mettre à la faute et remporte ce match 15 à 13 après le coup de sifflet de la délivrance.

Après dix ans de disette, en dépit de statistiques complètement à l’avantage de l’Irlande, le XV de France remporte une précieuse et probante victoire en Irlande, se positionne en sérieux candidat à la victoire dans ce tournoi des 6 nations 2021 et confirme l’adage : « tant qu’on ne perd pas on est en route pour le grand chelem ».

à chacun son rugby,

Laurent Delmas

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