Les vieux du stade 2° partie

Pénalité de Morgan Parra

Rien à voir avec l’émission Stade 2, le post d’aujourd’hui fait suite à l’article « Les vieux du stade » publié juste après la finale du top 14 de rugby. Il méritait une suite, car il lève le voile sur une question:

Où sont passés nos jeunes rugbymen dans le Top 14 ?

Au Stade de France ce samedi 9 juin, la moyenne d’âge des joueurs alignés au coup d’envoi était de 29 ans, et seuls deux joueurs étaient âgés de moins de 24 ans au jour de la finale: Jean-Marc Doussain dans les rangs du Stade Toulousain, et Mathieu Bastareaud du côté du Rugby Club Toulonnais. J’ai donc mené une étude à partir des dates de naissance des titulaires au coup d’envoi des dix dernières finales du top 14 et recherché la présence des joueurs âgés de moins de 24 ans au jour de la finale dans le quinze de départ de l’équipe championne de France. Le constat est éloquent, très peu de jeunes prodiges obtiennent la confiance des entraîneurs et débutent le match les soirs de finale.

Jean-Marc Doussain est bien seul lors des deux derniers titres du Stade Toulousain en 2011 et 2012. Ils étaient deux lors du sacre de l’ASM en 2010 (Morgan Parra et Alexandre Lapandry), et un peu plus nombreux dans les rangs de l’USAP en 2009 avec Jérôme Porical, Maxime Mermoz et Damien Chouly. En 2008 Maxime Médard était l’unique joueur de Toulouse de moins de 24 ans. 2007 était un bon cru pour le Stade Français avec la génération des Julien Arias, Arnaud Marchois, Pedro Ledesma et Benjamin Kayser. En 2006 aucun joueur de moins de 24 dans les rangs du champion biarrot, qui une année auparavant alignait ses jeunes pousses Jean-Baptiste Gobelet et Guillaume Boussès. Avant les deux titres consécutifs du Biarritz Olympique, le Stade Français en 2004 présentait dans ses rangs Juan Martin Hernandez et Pierre Radaban, ce dernier étant accompagné du trois-quart centre Brian Liebenberg un an plus tôt.

Bref, en dix ans de Brennus, seulement 18 joueurs de moins de 24 ans ont débuté la finale, soit moins de deux en moyenne dans les rangs du champion de France de rugby. Pour mémoire, en 2001 le Stade Toulousain comptait cinq joueurs de moins de 24 ans, et pas des moindres puisqu’il s’agissait de Clément Poitrenaud, Frédéric Michalak, Nicolas Jeanjean, David Gérard et Jean Bouilhou, tandis qu’en 1992 le champion toulonnais faisait confiance aux minots Yann Delaigue, Patrice Tesseire, David Jaubert, Michel Périé et Gérald Orsoni pour ramener le bouclier de Brennus sur le rade. Alors que se passe t’il en France, les jeunes talents du rugby actuel sont-ils moins performants que leurs aînés ?

le jeune rugbyman Christopher Tolofua

La formation des jeunes joueurs de rugby en France en cause ?

On peut certes toujours faire mieux, mais les résultats internationaux des jeunes équipes de France de rugby démontrent qu’il y a toujours un réservoir de joueurs de qualité qui alimente régulièrement les clubs du top 14. En 2006 l’équipe de France de rugby des moins de 21 ans a été sacrée championne du monde face à l’Afrique du Sud, et depuis 2008 où les catégories moins de 19 et moins de 21 ans ont été supprimées au profit de la catégorie de moins de 20 ans, la France se maintient dans le groupe de tête des nations jouant au rugby. Avec une victoire dans le tournoi des 6 nations en 2009, et grosso modo un honorable cinquième rang mondial lors des coupes du monde annuelles, la France est bien représentée.

Ces dernières années, la Fédération Française de rugby a beaucoup fait évoluer les filières de la formation des jeunes rugbymen. Quelques chiffres clés, en 1995, création de six centres élite qui deviendront les pôles espoir, puis en 2009 création du pôle France. Actuellement les pôles espoir sont géographiquement répartis en France dans les villes de Sceaux, Tours, Dijon, Bordeaux, Ussel, Villefranche, Bayonne, Toulouse, Béziers et Hyères. Les jeunes talents sont mieux détectés, formés et suivis dans le temps grâce à ces centres de formation qui alimentent à présent régulièrement le XV de France. Les résultats sont positifs mais on attend encore plus en terme de résultats internationaux, pour pouvoir enfin combler l’éternel retard que l’on accuse face aux nations du sud.  Avec de telles installations, et au moment où la Fédération française de Rugby enregistre une augmentation record de 10% du nombre de licenciés en seulement un an (elle compte à présent plus de 450 000 licenciés), la France doit légitimement se fixer comme objectif de gagner la coupe du monde de rugby, que ce soit en 2015, ou plus tard.
le jeune talent Wesley Fofana

Mais alors pourquoi ne voit-on pas plus de jeunes talents lors des finales du Top 14 ?

Depuis 2004 les clubs professionnels ont pour obligation de posséder un centre de formation (il y en a à présent plus de 30 en France), et sont tenus depuis 2009 de compter dans leur effectif pro un nombre minimum de joueurs issus de la formation selon le dispositif des JIFF (joueurs issus des filières de formation). La FFR souhaite aller plus loin et planche sur un règlement qui obligerait les clubs professionnels à un quota de JIFF sur les feuilles de match, afin d’obliger ces derniers à donner un minimum de temps de jeu aux jeunes rugbymen. On a donc d’une part, des centres de formation mieux répartis géographiquement, et d’autre part, une obligation de « conserver » des jeunes dans leur effectif des clubs. Il en résulte qu’au lieu d’être concentrés dans trois ou quatre clubs comme par le passé, nos meilleurs jeunes rugbymen sont disséminés dans plus de clubs et ont assiste à une décentralisation des talents. C’est une explication plausible à ce phénomène, il y en a peut-être d’autres, à vous de les exprimer en commentant cet article.

à chacun son rugby, Hiboulot.

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2 thoughts on “Les vieux du stade 2° partie”

  1. Sur la forme et les chiffresje suis d’accord avec toi. Par contre sur les raisons, il y a beaucoup plus à dire.
    En effet, la France a fourni pendant des générations et jusqu’à la fin des années 90 des 3/4 qui faisaient peur à tout le monde par leurs qualités techniques et leur improvisation souvent géniale.
    Depuis les années 2000 et l’avénement, ou plutôt la catastrophe de l’ère Laporte, on a des bourrins, des tracteurs qui, certes vu leur poids pèsent sur les adversaires mais qui n’ont plus aucun génie et ne sont plus craints par personne. D’ailleurs il n’y a qu’à voir le nombre de matchs que nous gagnons grâce à des essais d’avants voire sans essais du tout mais des coups de pied.
    A cause de Bernard Laporte, le rugby français est devenu du jeu à 13 en plus morne et insipide. Il a imposé un modèle de jeu dans lequel doivent se fondre tous les jeunes joueurs et dans lequel sont moulés les plus agés. Pour s’en persuader il n’y a qu’à se remémorer les deux dernières demi et la finale du top 14 2012.
    Résultats, si ce rugby était à la mode dans l’hémisphère sud il y a près de 15 ans, il est aujourd’hui largement dépassé. Il n’y a qu’à regarder le jeu plein de fougue et d’enthousiasme des Blacks, mais aussi des Gallois, des Irlandais … même les Anglais s’y sont mis. Si ça c’est pas une preuve !!!
    A quand le retour du French Flair ? C’est toute la formation qu’il faut repenser pour donner l’envie d’attaquer, de créer, de prendre du plaisir au lieu d’apprendre à détruire et à mettre en place des défenses de fer. Certes la défense est plus qu’utile mais il faut d’abord savoir marquer pour ensuite défendre son avantage. Voilà la vraie philosophie du rugby.
    Ce n’est que par ces changements-là ou plutôt par la réappropriation de notre rugby que nous parviendrons un jour au titre suprème !

    1. Bonjour Arnaud et merci pour ton commentaire éclairé.

      Difficile de comparer deux générations de joueurs, les règles et la préparation des rugbymen étant différentes. Est-ce que les crochets et la vista d’un Codorniou ou d’un Lagisquet feraient des brêches béantes dans les défenses d’aujourd’hui, ou bien est-ce qu’ils se feraient couper en deux par les trois-quarts modernes ?

      Les défenses ont énormément progressé ces dernières années et les entraîneurs ont (trop ?) focalisé leurs efforts sur ce secteur du jeu. Mais hélas le constat est sans appel: empêcher le jeu adverse et gagner du terrain au pied c’est le rugby qui gagne en ce moment. Espérons que c’est seulement un cycle et qu’à présent que toutes les équipes ont à peu près le même niveau en défense (et par conséquent se neutralisent) les entraîneurs vont passer à autre chose et innover. L’avenir appartient peut-être de nouveau aux attaquants, les gallois ont effectivement séduit pendant le tournoi et la coupe du monde en proposant un rugby plus dynamique et tourné vers l’attaque.

      Mais le french flair reviendra t’il un jour ?

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