L’article au sujet de la cinquième minute du match entre Toulon et Clermont méritait une suite car il a soulevé de nombreux commentaires. Des références à d’autres matchs et décisons arbitrales litigieuses sont alors remontées à la surface, et à creuser ainsi on a bien failli tomber sur le fossile de l’essai de Gary Whetton. Une précision tout d’abord, mon dernier post n’était pas dirigé envers l’arbitre principal de la rencontre ni sur l’arbitrage du match en général, mais seulement consacré à une seule décision de l’arbitre de touche à la cinquième minute du match.
Il faut être prudent lorsqu’on critique un arbitre. D’abord parce que dans 80% des cas on a tout simplement tort par méconnaissance des règles. Ensuite il faut être indulgent et respectueux envers une personne qui a l’entière responsabilité de voir tous les faits et gestes de trente joueurs sans l’aide du ralenti ni de la vidéo (à part sur essai, mais dans ce cas la vidéo ne prend en compte l’action qu’à partir les cinq mètres précédant l’en-but). Les arbitres n’ayant pas non plus d’yeux derrière la tête, il n’est pas possible pour eux de tout voir durant un match de rugby: on ne peut siffler que les fautes que l’on voit. Quant à accuser un arbitre de favoriser une équipe par des décisions à sens unique, c’est quasi impossible à prouver, aussi c’est un pas que je ne franchirai jamais. Vous me direz alors: « C’est trop facile, les arbitres peuvent faire ce qu’ils veulent !!! » Ce à quoi je répondrai: « euh… oui ! »
Mais pas question donc d’accabler l’arbitre de touche d’avoir voulu favoriser l’équipe de l’ASM. Ceci étant dit, aucun doute possible, il a tout comme nous parfaitement vu Julien Malzieu se saisir du ballon dans le terrain et effectuer plusieurs appuis en étant porteur du ballon avant de sortir en touche. L’action n’est pas litigieuse, à ce niveau là (et à tous les niveaux d’ailleurs) un arbitre de touche placé à moins d’un mètre d’un joueur ne peut pas ne pas voir si ce joueur a posé ou pas le pied dans le terrain. L’arbitre a levé son drapeau pour signaler la sortie en touche, il a hésité pour en indiquer le bénéficiaire, et après c’était trop tard, l’ailier de l’ASM s’était fait la belle. Qu’est-ce qui a provoqué cette hésitation de l’arbitre de touche à la cinquième minute du match Toulon Clermont ? La peur ?
Les arbitres ont-il peur d’arbitrer le rugby club de Toulon ?
Le mot est lâché: « LA PEUR ». C’est juste une théorie, faites-en ce que vous voulez, mais j’ai la conviction qu’à présent les arbitres ressentent de l’appréhension au moment d’arbitrer Toulon. Ces matchs sont devenus particuliers, les arbitres ont le doute, leur sifflet perd un zeste d’assurance, de spontanéité, et ils peuvent se mettre à commettre des erreurs justement par peur de les commettre. Le complot anti toulonnais je n’y crois pas vraiment, simplement le corps arbitral et les toulonnais ont perdu de leur objectivité et le fantôme de la persécution arbitrale plane sur les matchs des rouge et noir. Le problème c’est que ce sentiment d’injustice commence à avoir un impact négatif sur le jeu du RCT qui vient de perdre la première place du classement du Top 14.
Lorsque l’on voit un garçon comme Matt Giteau avoir des gestes d’exaspération sur le terrain, on sent qu’il y a comme un malaise car ce n’est pas du tout le genre du joueur australien. Ce sentiment de sod… pardon, de persécution arbitrale, peut-être né sous les travées du stade Marcel Michelin le 8 janvier 2012 lors d’une interview de Mourad Boudjellal est en train de gangréner, de dérégler le jeu des toulonnais. Les rouge et noir sont en train de dépenser une énergie considérable en se focalisant sur l’arbitrage. Et cette énergie laissée en route pendant que leurs principaux rivaux travaillent dans la sérénité risque de leur faire défaut lors des phases finales. Rien n’est plus négatif psychologiquement que d’avoir l’excuse de la défaite avant même de jouer un match. Si les toulonnais s’entraînent dans un sentiment de persécution permanente, il seront des vaincus d’avance et ils perdront inexorablement.
J’imagine à présent combien il est difficile de ne plus l’évoquer, mais si j’étais joueur ou entraîneur toulonnais, je ne parlerais plus jamais d’arbitrage. Jamais. J’essaierai de revenir à mon propre jeu et de me concentrer sur un objectif de performance en faisant abstraction de toute influence extérieure (et en particulier de l’arbitrage contre lequel on ne peut rien à part faire s’aggraver les choses). La persécution arbitrale envers Toulon, si tant est qu’elle existe, ce sont peut-être les toulonnais eux-même qui l’ont créée. Il leur appartient désormais de s’en débarrasser. Il est encore temps…
Laurent Delmas, envoyeur spécial de Rugby à XV de France.